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1er-Mai : entre 106 000 et 170 000 manifestants dans toute la France
2021-05-04 22:26:01


Plus de 300 cortèges étaient organisés dans le pays, notamment à Lyon, Nantes, Lille et Toulouse. Dans la capitale, où des heurts avec la police ont bloqué le cortège pendant deux heures, la préfecture de police a fait état de 46 interpellations.

Un manifestant tendant la main dans laquelle est inscrit un slogan anti-Macron, samedi 1er mai à Paris.

Du muguet et des manifestations : pour la seconde année consécutive, les syndicats ont célébré samedi la Journée internationale des travailleurs à l’aune du Covid-19, mais la mobilisation sociale a repris cette fois des airs plus classiques dans la rue.

La Confédération générale du travail (CGT) avait appelé, avec Force ouvrière (FO), la Fédération syndicale unitaire (FSU) et Solidaires, à faire du 1er-Mai une « journée de mobilisation et de manifestations »« pour l’emploi, les salaires, les services publics, la protection sociale, les libertés et la paix dans le monde ».

Présent dans le cortège, Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT, a expliqué à des journalistes que la mobilisation avait pour but d’« éviter que le mois de mai et les mois qui suivent soient à l’identique de ce qu’on a connu avant le confinement, c’est-à-dire des restructurations, beaucoup d’argent pour ceux qui en ont beaucoup et encore moins pour ceux qui n’en ont pas ».

« Le président de la République ne peut pas dire, quand ça l’arrange, que le modèle social est important, avant de réformer pour tout casser », a taclé le secrétaire général de la CGT. Pour lui, Emmanuel Macron veut notamment « casser le code du travail » avec ses réformes, dont celle de l’assurance-chômage, dénonce le syndicaliste.

Des manifestations un peu partout en France

Le sécrétaire générale de la CGT, Philippe Martinez, en tête du cortège parisien, le 1er mai 2021.

La CGT, qui annonçait près de 300 manifestations dans l’Hexagone, notamment à Nantes, Marseille ou Lyon, a comptabilisé 150 000 manifestants à travers le pays, avant de revoir ce bilan à la hausse à 170 000. Le ministère de l’intérieur, de son côté, en a dénombré plus de 106 000, dont 17 000 à Paris. En 2019, le ministère de l’intérieur avait comptabilisé 164 000 manifestants et les syndicats 310 000 personnes.

Lyon, où 3 000 personnes ont défilé, selon la préfecture, un bref affrontement a éclaté en début de manifestation entre un petit groupe de black blocs et des policiers. Des vitrines et panneaux publicitaires ont été endommagés, a constaté un journaliste de l’Agence France-Presse (AFP) sur place. La préfecture a fait état de cinq interpellations. La manifestation s’est achevée dans le calme.

Marseille, sous une météo là aussi peu clémente, environ 3 500 manifestants, selon la préfecture, sont partis du Vieux-Port pour crier leur colère, notamment face à la réforme de l’assurance-chômage. A Rennes, ils étaient 2 000, selon FO – contre 1 700 selon la préfecture. A Saint-Etienne, ils étaient entre 1 300 (selon la police) et 2 000 (selon la CGT). Un ordre de grandeur similaire a été observé dans les cortèges de Lille.

Des manifestants (environ 2 000 selon la CGT) se sont aussi rassemblés non loin de Caudan (Morbihan), où est implantée l’usine de la Fonderie de Bretagne, en grève contre la cession du site par Renault.

Nantes, la manifestation réunissait 3 750 personnes, selon la préfecture, qui a fait état de « quelques heurts » momentanés liés à la présence d’« une centaine de personnes de l’ultragauche ».

Plus d’un millier de personnes ont défilé aussi dans le centre-ville de Toulouse sous une pluie fine, avec une importante délégation de « gilets jaunes », tandis qu’ils étaient entre 1 600 (selon la police) et 4 500 (selon les syndicats) dans le centre-ville de Bordeaux, dans un ensemble hétéroclite et coloré.

Strasbourg, où ils étaient entre 1 300 (selon la police) et 5 000 (selon les syndicats), on pouvait lire sur des pancartes : « Retrait de la réforme chômage » ou « Ma retraite sera aussi pourrie que ma pancarte ». Dans le cortège, Clarisse Daull, retraitée de l’édition, a affirmé avoir eu envie « de venir deux fois », ayant « beaucoup souffert de ne pas défiler l’an dernier »« Depuis un an, il n’y a qu’un seul sujet, c’est le Covid » alors que « les travailleurs continuent à souffrir », a-t-elle déploré.

Un cortège tendu à Paris

Paris, le cortège s’est élancé à 14 heures de la place de la République en direction de la place de la Nation, à l’appel des quatre organisations syndicales et des mouvements de jeunesse Union nationale des étudiants de France (UNEF) et Union nationale lycéenne (UNL). Les numéros un de la CGT et de FO défilaient côte à côte. A l’occasion des cent cinquante ans de la Commune de Paris, la gauche radicale était de la partie, annonçant un cortège « Commune en tête de manif ». Plusieurs centaines « gilets jaunes » ont également manifesté samedi matin dans le nord-ouest parisien, avant de rejoindre la place de la République.

De son côté, la Préfecture de police de Paris avait fait savoir qu’elle prévoyait un « dispositif adapté » pour parer l’éventuelle « présence d’éléments radicaux », sans préciser le nombre d’agents déployés. En 2019, Philippe Martinez avait dû quitter le carré de tête, pris dans des affrontements entre la police et des black blocs. Avant le départ de la manifestation, la préfecture annonçait que 17 interpellations avaient eu lieu. A 17 heures, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, faisait état sur Twitter de 34 interpellations.

Après une grosse demi-heure de défilé, la situation s’est tendue dans le cortège parisien, entraînant l’intervention de la brigade de répression de l’action violente contre des « tentatives répétées de constitution d’un black bloc en avant du cortège syndical », a déclaré une source policière. « Ces éléments n’avancent pas alors qu’ils ont de l’espace pour le faire. »

La vitrine d’une succursale de la Société générale, située boulevard Voltaire, dans le 11e arrondissement de la capitale, a été dégradée au passage du cortège, parti de la place de la République pour rejoindre celle de la Nation. Les vitres d’un abribus ont également été détruites ; des projectiles ont été lancés en direction des forces de l’ordre, qui ont répliqué avec du gaz lacrymogène ou avec des grenades de désencerclement. Un policier, manifestement blessé, a été évacué par les pompiers, a constaté une journaliste de l’Agence France-Presse.

Notre journaliste sur place, Cécile Bouanchaud, a fait état d’au moins un autre blessé, boulevard Voltaire, lors de la charge. Ce dernier a été pris en charge par les pompiers, conscient.

Laurène, militante féministe de 27 ans, est venue avec plusieurs amies « car aujourd’hui on ne peut plus manifester seule à cause de la répression policière »« C’est de plus en plus compliqué de manifester », déplore t-elle après avoir dû emprunter des rues adjacentes pour éviter les affrontements avec les forces de l’ordre. Venir à cette manifestation était pourtant pour elle une évidence : « Le 1er mai marque la lutte pour les droits des travailleurs et des travailleuses, les femmes sont les plus précaires sur le marché du travail, elles sont les premières victimes du système capitaliste. »

Des militants CGT victimes de violence

En fin d’après-midi, le cortège a fini par rejoindre la place de la Nation, où la situation s’est tendue alors que la police cherchait à disperser les manifestants, peu avant le couvre-feu de 19 heures. Selon l’AFP, des « gilets jaunes » s’en sont pris à des militants de la CGT, qui a déploré « plusieurs blessés ».

Au total, 56 personnes ont été interpellées, dont 46 à Paris, a ajouté le ministère, et six policiers ont été blessés dont trois dans la capitale. La CGT a de son côté déploré samedi soir « 21 blessés dont 4 graves », victimes d’une « extrême violence » commise par « un important groupe d’individus dont certains se revendiquant gilets jaunes » en toute fin de manifestation parisienne. « Insultes homophobes, sexistes, racistes, ont précédé des actes de vandalisations des véhicules des organisations », a énuméré la centrale dans un communiqué, évoquant « un déchaînement de coups et de jets de projectiles » dont les militants CGT étaient selon le syndicat la « cible » privilégiée.

« Pas l’alpha et l’oméga »

A un an de la présidentielle, certains responsables politiques de gauche avaient annoncé leur présence, à l’instar de Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) à Lille, de Fabien Roussel (Parti communiste) dans la même ville puis à Paris, ou encore Olivier Faure (Parti socialiste) et Julien Bayou (Europe Ecologie-Les Verts), également dans la capitale.

Certains d’entre eux mettent en avant la contestation de la réforme de l’assurance-chômage qui doit commencer à entrer en vigueur au 1er juillet et est dénoncée unanimement par les cinq grandes centrales syndicales. Le secteur culturel, qui conteste la réforme, devait d’ailleurs grossir les rangs après un départ du théâtre de l’Odéon, à midi.

FO entendait aussi montrer que « s’il faut monter au créneau contre un retour du dossier des retraites, on y montera ». Le syndicat a lancé la journée à Paris avec un hommage aux combattants de la Commune, devant le mur des Fédérés, au cimetière du Père-Lachaise.

Quasiment au même moment, la CFDT (Confédération française démocratique du travail) organisait de son côté un rassemblement virtuel à travers des échanges sur Facebook avec des militants. « Vu les conditions sanitaires, on a fait le choix de faire de façon virtuelle encore cette année », a expliqué son secrétaire général, Laurent Berger, samedi sur Franceinfo. Il a dit assumer ce choix et déclaré que le 1er-Mai « n’est pas non plus l’alpha et l’oméga de la mobilisation syndicale ». « Je crois que le risque sanitaire est toujours réel, donc il faut faire gaffe », a-t-il ajouté, tout en assurant ne pas critiquer « le choix des autres ».

Alors qu’Emmanuel Macron a dévoilé, jeudi 29 avril, un calendrier du déconfinement en quatre étapes, qui devrait s’accélérer entre le 19 mai et le 30 juin, la CGT espère que ce 1er-Mai sera le début d’une montée en puissance des mobilisations. « D’autres journées d’action en mai et juin scanderont ce printemps offensif », a prévenu Philippe Martinez.


Source: Le monde